vendredi 16 janvier 2015

Littérature et politique, « The best Sollers »

Le dernier livre de Philippe Sollers figurait parmi mes lectures de fin d’année.
Ensemble de chroniques souvent inspirées par l’actualité et choix éditorial personnel, le tout finalement assez réjouissant.
Entrons directement dans le vif du sujet avec quelques moments choisis, Moscou, par exemple:
Les Russes nous étonneront toujours. Après avoir réduit Marx à un catéchisme d’application sinistre, voici qu’ils le déclarent «nuisible » pour la population. Un jeune écrivain non-conformiste, Viktor Pelevine, est mis dans le même sac réprobateur. C’est que la littérature, voyez-vous, doit être nationale et morale et que « certains auteurs portent atteinte à l’esprit des russes ».
 
Même si ce genre, la chronique, est considéré comme mineur en littérature, il a donné lieu à quelques compilations particulièrement réussies. Je pense à Choses vues de Victor Hugo ou encore aux Chroniques italiennes de Stendhal.
 
Ici, le propos de Sollers, outre le fait de rassembler des articles écrits entre 1999 et 2013 pour le JDD, conduit le lecteur à constater combien politique et littérature sont intimement liées, se nourrissant souvent l’une de l’autre..
Certes, tous les écrivains cités n’ont pas signé de manifeste ou de tribune politique. Ils sont néanmoins porteurs d’un monde en mouvement perpétuel. L’œil aux aguets.
Littérature et politique  a donc l’excellent mérite de revisiter notre bibliothèque commune à l’aune des défis du siècle et de nous offrir ses lumières, de Montaigne à Nietzsche en passant par l’immense Voltaire. Impossible de tous les nommer. Il faut se procurer le livre. A défaut, je veux bien le prêter…
 
J’ai apprécié l’exercice même si je ne suis pas particulièrement encline à lire du Sollers. Vague souvenir de Femmes et d’en avoir surtout retenu le « donjuanisme » du héros. Don Juan, ou plutôt Casanova, hédoniste libre-penseur, généreusement célébré par Sollers.
Ma mémoire est certainement injuste…
En tous cas, avec lui, pas de « clown triste » façon Houellebecq.
Tant mieux car en ce début d’année, après le recueillement national, on veut aller de l’avant. Le bel esprit de Philippe Sollers nous y invite. Eric Zemmour ne s’y est pas trompé. Il déteste le livre et son auteur.
Raison de plus pour aimer Littérature et politique  et sa plume alerte qui laisse filtrer l’ironie mais jamais le fiel.
Sollers, de son vrai nom Philippe Joyaux, est tout sauf misanthrope. Encore moins un pourvoyeur de boucs émissaires...
S’il ne dédaigne pas le divan du psy, il préfère coucher nos névroses sur le papier, avec humour.
Et son livre, sans être un best-seller, contrairement à d’autres, est un divertissement intelligent, là encore contrairement à d’autres … best-sellers du moment.
 
Et puis se replonger dans une actualité, déjà ancienne, donne un certain éclairage au présent.
Avec parfois une surprenante concordance des temps. Comme dans Turquie : Le poète Mallarmé, en bon prophète, voyait venir vers nous « un tourbillon d’hilarité et d’horreur ». Nous y sommes (…) La Turquie ne veut pas reconnaître le génocide arménien ? Glace. Le ministère turc de l’Education censure les manuels scolaires comportant une reproduction de La Liberté guidant le peuple de Delacroix ? On s’esclaffe, mais sur fond d’abîme.
 
Voilà donc un nouveau livre pour la bibliothèque. Le seul dilemme étant son classement : Littérature ou politique ?? Le mieux étant peut-être de le laisser libre de ses allées et venues.

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