Je ne sais pas vous mais moi j’aime bien voyager en train.
Je dis voyager, et pas seulement effectuer des trajets professionnels, une
tablette sur les genoux ou un portable vissé à l’oreille.
En fait le train, c’est rassurant, les rails certes, mais
aussi le roulement qui berce et la vue du paysage qui défile. « La Bête
humaine » a l’art de nous transporter avec imagination. Le temps du voyage
devient évasion si l’on choisit bien son compagnon de bord. Muni d’un livre par
exemple, mais pas d’un roman de gare ... De nouvelles, que l’on ne saurait
réduire à la gazette du jour, ou encore d’un essai, de mémoires. Le choix est
vaste et peut être lié à la durée et à l’attrait du voyage, ou décorrélé de son
objet. La lecture va se poser au gré des haltes, reprendre son cours, s’amuser
de son reflet dans la vitre, suivre les sursauts de la voie.
Et soudain être interrompue par une autre voix, celle du contrôleur
... de billets.
Retour à la réalité, un peu abrupt. Les voyageurs alentours.
Car en train, on est rarement seul.
Les aléas d’un voisinage temporaire ne sont pas forcément
dénués de charme. A condition d’être chanceux au jeu des places. En cas de passagers
trop envahissants, on peut toujours se délasser les jambes dans les couloirs,
rejoindre la voiture-bar, le wagon restaurant.
Se balader à l’intérieur du voyage… Toutes choses que le vol
aérien ne permet pas avec la même aisance, même s’il a l’avantage de nous
propulser la tête dans les nuages. Douceur ouatée pour traversée fulgurante.
Voiture 7, numéro 28. Le contrôleur a quitté la rame et l’on
peut renouer avec la lecture, le rêve éveillé, à moins d’avoir une
correspondance à prendre…
Petit souvenir anecdotique qui me vient en route. C’était il
y a cinq ans, un voyage à Rome. Nous avions choisi le train. Pas de signe
particulier à l’aller, si ce n’est la présence bavarde d’un couple d’italiens,
et de leur armada de bagages estampillés Costa Croisière embarqués à Gênes.
L’inopiné réveil du volcan Eyjafjoll nous valut en revanche un retour des plus
spectaculaires. Face à la pénurie d’avions, les touristes se rabattaient sur tous
les trains au départ de Termini. S’ensuivit une cohue sans nom, passagers
et valises postés ça et là, familles dispersées, en pagaille. Une fin de
vacances de printemps aux allures de rapatriement d’urgence… Pour finir, une
grève surprise nous obligea à une nuit à la frontière italienne.
A Vintimille, retour au calme. Pax Romana.
Le temps de songer à un de ces voyages mythiques, de ceux
qui rallient l’Europe aux portes de l’Orient. Aux escales insolites.
Combien d’histoires, de récits, avec un train en toile de
fond, à compartiments ou pas. L’endroit a beaucoup séduit les écrivains,
d’Agatha Christie aux auteurs contemporains.
Et les amateurs de quais de gare…
La nuit tombe et, à la campagne déserte, succède la ville. Ses
lumières.
Bientôt la Part-Dieu. Le Crayon est en vue. Un dimanche soir
ordinaire si ce n’est l’emballement médiatique d’une après élection et les
commentaires redondants auxquels j’aurai provisoirement échappé.
Dimanche prochain, second tour électoral, sauf à Lyon et
Paris. Pour les autres, tous ceux qui iront voter, prendre garde au changement
d’heure intervenant dans la nuit du 28 au 29 mars, à deux heures précises. Pas
un horaire de train mais une consigne parmi d’autres...
E pericoloso
sporgersi !