C’est une histoire banale. Un matin ordinaire, la radio
allumée au réveil, ronron des voix familières, interrompu par les nouvelles du
ciel. Et puis soudain, ce petit rien qui vous fait balancer, sourire aux
lèvres. La musique fuse et infuse doucement, le tempo se met à vibrer au bout
de vos doigts, jusqu’à battre la mesure en rythme. Le corps ondule tel un
métronome, de droite à gauche, de gauche à droite. Inutile de résister au
mouvement, le mal est fait. Vous savez que de cet air-là, vous ne pourrez plus
vous en départir de la journée…
Cela tient à peu de choses. Un souvenir, une émotion
ravivée, une rencontre, la vôtre et celle de la chanson, portée par une voix
qui vous susurre à l’oreille : « C’est un beau roman, c’est une belle
histoire… ». Annie Ernaux dans un de ses livres – Passion simple, souligne combien les chansons populaires, les «canzone»,
ont accompagné sa vie amoureuse, par vagues plus ou moins conquérantes. Dans
ces romances, distillées au gré des ondes, elle dit avoir pu puiser, çà et là,
les mots entrant en résonance avec son histoire. La mélodie prompte à
cristalliser son humeur du moment, triste ou gaie, et à faire écho à ses
sentiments, un peu, beaucoup, passionnément …
L’observateur amusé pourra voir dans ce balancier du
cœur, une métaphore de la vie politique actuelle. En période électorale, dans
les débats, les discours, la tentation est grande de chercher à séduire
l’électorat plutôt que de parler à son intelligence. De privilégier la
démagogie à la pédagogie. La parole politique peut alors reprendre à son compte
ces aimables ritournelles où chacun, chacune d’entre nous pourra se reconnaitre,
et in fine, se rassurer sur sa propre destinée. L’art et la manière de nous balader
comme des midinettes, ne sachant plus sur quel pied danser... Mais donner la
sérénade aux français n’a jamais fait un programme pour la France. Et au refrain du « J’accuse »,
d’aucuns se seront même discrédités. Il ne suffit pas de convoquer Zola pour en
avoir le talent et la légitimité.
Quant à ceux qui préfèrent user et abuser de Dutronc, et
nous donner le change en retournant leur veste, c’est une vieille rengaine, un
peu triste...
Fort heureusement, dans cette drôle de campagne, il reste
encore quelques candidats sincères et crédibles, dont celui que je continue à
soutenir pour sa vision du monde de demain et sa fidélité au projet socialiste.
C’est Benoît Hamon et sa démarche positive, le vote utile aux hommes et aux femmes
de ce pays, utile aux générations futures. Un candidat qui s’adresse à nous
sans nous infliger de vieux couplets ou d’indigestes bruits de casseroles !
Pour finir en musique, et sans fausses notes, je veux saluer
ici la performance de Rebecca Manzoni qui, chaque matin, dans « Pop and co »
sur France Inter, nous livre les secrets d’une chanson de son choix. Une
séquence de 4 minutes alliant la dissertation sur un texte et sa partition. De
Brassens à Bob Dylan, en passant par Travolta en pleine « fièvre du samedi
soir », la chroniqueuse se plait à décortiquer une playlist intemporelle,
qui n’a d’égale que la fantaisie de son auteur. Quand le cœur, l’esprit et
l’intelligence s’en mêlent, cela donne le meilleur. De ces chansons qui nous ressemblent
et nous rassemblent aussi, l’instant d’une Javanaise.
Loin du vénéneux chant des sirènes…