Alors, si j’y allais de mon couplet…
Médiatique, mercantile, décrié et idolâtré à la fois, proie
favorite des hooligans et bûcher des vanités, le football cumule les
superlatifs en tout genre, pour le meilleur et pour le pire. Il n’en reste pas
moins éminemment populaire, sait à coup sûr faire vibrer les cœurs et pas
seulement au moment d’entonner les hymnes nationaux… Peu de sports ont ce pouvoir-là.
Drapeaux peints sur le visage, emperruqués, les supporters s’affichent aux
couleurs de leur pays. Tant que la rivalité n’attise pas les rancœurs
nationalistes à proximité des stades, tout va bien. D’ailleurs, ces bagarres de
rue, savamment orchestrées par des esprits très éloignés de la pratique et de
la compétition sportive, sont plus un avatar du climat ambiant que la « loi du foot ».
Les nombreux supporters croisés dans les rues de Lyon la
semaine dernière n’appartenaient heureusement pas à cette catégorie. Allure de touriste bon enfant, pacifiques appareils
photo en bandoulière, nez en l’air, se baladant entre averses et éclaircies car
le temps n’était pas vraiment de la partie… Mais les supporters de l’Irlande du
Nord sont habitués aux sautes d’humeur de la météo. Depuis, l’été et la chaleur se sont imposés à Lyon, et
d’autres partisans sont venus encourager
leur équipe favorite, nos amis portugais
en tête.
A les voir déambuler ainsi, je me suis posée la question de
savoir ce qui différenciait un supporter made in 2016 d’un supporter des
décennies précédentes. Et si au refrain du « c’était mieux avant », on
pouvait s’essayer sans risque. J’ai ainsi dû piocher dans mes propres souvenirs et
revivre en pensée l’époque où un certain Michel Platini faisait ses débuts à
l’AS Nancy Lorraine, sous le maillot orné de l’emblématique chardon « Qui
s’y frotte, s’y pique ». Jeune garde montante de l’équipe, évoluant en duo
avec Olivier Rouyer, il jouait déjà son avenir. Petite anecdote au passage : ma prof de
français d’alors, invitée à une réception à l’hôtel de ville en présence des
joueurs de l’ASNL, avait rapporté à tous ses élèves des photos dédicacées des
deux stars locales. Une vraie fan cette Evelyne ! Oui, elle s’appelait Evelyne
ma prof, et vivait encore chez ses parents … Il n’y a pas de prédestination à
la condition de fan, toutes origines confondues, d’ici et d’ailleurs, dans la
mêlée filles, garçons, jeunes, vieux, répondant au nom d’Abdel, de Vincent, de
Marco, de Thierry, de Louiza, de François, tous solidaires et unis vers un même but, la victoire de leurs
champions.
Séquence plutôt amusante à revisiter même si, à quinze ans, je
n’étais pas une grande supportrice. Mes héros à moi étaient plus à chercher du
côté de la musique. Les footeux à la maison, c’étaient les hommes, père,
grand-père et oncle paternel. Et impossible de regarder autre chose à la télé
un soir de match, surtout quand les bleus jouaient. Là, je m’arrête un instant pour
lever toute ambiguïté car sous l’égide de « bleus » il y avait bien deux
équipes de nationalité différente : l’équipe de France et la squadra
azzura… La soirée la plus cruelle étant celle où les deux camps s’affrontaient
sous les yeux de leurs supporters meurtris, coupés en deux, crucifiés … Et croyez-le,
dans ce cas de figure, le spectacle était autant dans la lucarne que de l’autre
côté de l’écran…
Quand Michel Platini, après une carrière chez les Verts,
s’est envolé pour la Juventus, remportant au passage tous les trophées et toutes
les consécrations possibles, le fils d’Aldo et d’Anna réussit à faire vibrer plus encore le cœur de
tous ceux qui avaient la France et
l’Italie en partage. Devenu Platoche, surnommé « le roi Michel » par
nos cousins transalpins, immortalisé en milieu de terrain offensif, trois fois « Ballon
d’or », le capitaine des bleus fût
un joueur d’exception. Même s’il est aujourd’hui éclaboussé par une affaire de pot de vin au
sein de la FIFA, il reste ce « numéro 10 », qui aura fait rêver des
générations d’amateur de ballon rond. Des « tifosi »avertis de la
tête aux pieds, et fiers d’être européens car des pays du Sud, l’Italie a bien
été le premier à rallier l’Union Européenne, aux côtés de la France. Et à prendre sa place dans l’histoire. Quoique
critique, Beppe Grillo, auréolé de ses derniers succès électoraux, se déclare
un partisan du maintien de l’Italie dans l’Union. Mais à quel prix ? Reste
à voir comment les tenants de la ligue
du nord, toujours fermement opposés à l’accueil des migrants, tenteront de
légitimiser leurs positions suite au Brexit. A l’instar d’autres populistes.
Retour au foot, et clin
d’œil final à Michel Platini : maintenu dans l’ombre de cet Euro 2016,
il est né un 21 juin, en plein solstice d’été. De l’ombre à la lumière. .. Avec quelques jours de retard, bel anniversaire à lui et allez
les bleus !