La semaine écoulée a été marquée par deux grands événements
concernant les droits des femmes : le 40ème anniversaire de la
loi Veil légalisant l’avortement en France et la Journée Internationale contre
les violences faites aux femmes.
C’est dans ce cadre que s’inscrivait la soirée organisée à
l’Hôtel de Ville le mardi 25 novembre, en présence d’Annick Houel, conférencière
et professeure de Psychologie sociale à l’Université Lumière Lyon 2. Aux
racines de la violence envers les femmes, Une misogynie meurtrière qui perdure.
L’intitulé de la conférence nous rappelle qu’en France, tous les trois
jours, une femme meurt des suites des coups et blessures infligées par son
compagnon.
Un constat dramatique, et une lutte de tous les instants
pour les associations qui oeuvrent à prévenir ce type de violence et à accompagner
les femmes en danger.
Le gouvernement, au travers du ministère des Droits des
femmes et de la mise en place d’un plan interministériel, s’est engagé à combattre
ce fléau, sur le terrain. Najat Vallaud Belkacem, a beaucoup fait à cet égard, notamment
pour activer le partenariat avec les associations. Filactions, le Planning Familial, Femmes
Solidaires pour en citer quelques-unes.
Les victimes sont issues de tous les milieux sociaux. Il n’y
a pas de « prédestination », sinon le point commun d’être nées de
sexe féminin.
En revanche, le processus est presque toujours identique. Au
départ, il y a une histoire d’amour, avant le premier « dérapage »,
les insultes et les agressions dévalorisantes, presque invariablement suivies
des premiers coups.
La presse fait régulièrement le portrait de ceux que l’on
nomme les « pervers narcissiques ».
Dans cette relation toxique, les victimes sont souvent prises
au piège.
Consentantes non, mais soumises à la pression sociale, à la
peur de dire les maux endurés, oui. Quand les violences s’exercent dans la
sphère privée, familiale de surcroît, grande est la tentation de vouloir sauver
les apparences, pour l’image mais aussi pour soi, pour ne pas s’avouer l’échec
de la relation amoureuse. Comme l’a justement dit Annick Houel lors de sa
conférence, il reste souvent à ces
femmes « l’espoir de l’amour », même après des années…
Comme la littérature a elle aussi des vertus éducatives et a déjà pu contribuer
à l’évolution des droits des femmes, cf. Simone de Beauvoir, Le Deuxième
sexe, je tiens à évoquer un écrivain qui s’intéresse beaucoup à nos vies
modernes. Il s’agit d’Eric Reinhardt, auteur du Moral des ménages, de Cendrillon.
Son dernier livre L’amour et les forêts retrace le
parcours d’une femme, soumise à l’emprise obsessionnelle et destructrice de son
mari. Bénédicte Ombredanne, c’est le nom de l’héroïne, a un métier qu’elle
aime- prof de lettres-, des enfants. Elle a été une jeune fille solaire et
extravertie avant de sombrer, minée par l’enfer conjugal qu’elle vivait. Jusqu’à
oser une échappée, en deux temps…
Voici un extrait du livre, pages 135-136 : « Je
n’y crois pas un seul instant à ton histoire de promenade dans les Vosges, je
n’y crois pas une seule seconde à ton histoire de panne d’essence, à ton
histoire de soleil à savourer, à ton prétexte de faire le point, de prendre de
la distance, de la hauteur ! (…) Madame, pour réfléchir, elle a besoin de
hisser ses infimes capacités intellectuelles au sommet de la Schlucht, sinon
elle ne voit rien, elle n’a aucune visibilité sur son existence ! Faire le
point ! On aura tout vu ! Parce que tu as besoin de réfléchir, de
faire le point ? Ta triste vie t’impose de réfléchir, de faire le
point ? Madame n’est pas heureuse ? C’est son mari, c’est ça ?
Son mari ne lui convient plus ? Il ne peut plus satisfaire ses besoins
sexuels, ses besoins métaphysiques, ses besoins de vie radieuse et féerique,
pour employer des adjectifs que madame affectionne ? »
Ce discours inquisiteur va se poursuivre jour après jour,
nuit après nuit, et sera relaté dans un troublant échange épistolaire entre
Bénédicte et l’écrivain, devenu le confident du désespoir de son héroïne. Comme
une mise en abyme.
Le roman d’Eric Reinhardt était dans la liste des nominés au
Goncourt et a finalement obtenu le prix Renaudot des lycéens. Une belle
reconnaissance tout de même et l’espoir que cette jeunesse éclairée porte haut
les couleurs de l’égalité femmes-hommes !
Pour ne jamais oublier Bénédicte Ombredanne…
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