Bon, je ne pensais pas un jour écrire un billet sur le sujet.
Tout le monde s’écharpe déjà à ce propos et comme le dit justement mon camarade
Romain Blachier, il y a d’autres problèmes à régler dans la société
française… Mais l’autre matin, en
entendant un animateur de la matinale de
France Inter- animateur que j’apprécie par ailleurs - interviewer la Ministre
de la Famille, je me suis sentie obligée de réagir… Pas à propos de cette loi
fraichement votée pour pénaliser les clients de la prostitution, mais sur la manière
de traiter à la légère la question du port du voile. Franchement, Patrick Cohen
je vous ai trouvé un peu désinvolte,
voire un tantinet réducteur face à une femme, ministre ou pas, qui défendait des
positions de femme et de citoyenne engagée.
Oui, osons le dire, le voile intégral peut être un outil
d’asservissement. Le moyen le plus sûr de faire disparaitre le corps des femmes
derrière des pans de conservatisme. Comme
l’a justement rappelé Laurence
Rossignol, on commence par cacher le corps qui, selon un dogme édicté il y a
des siècles, ne doit pas apparaitre dénudé
dans la sphère publique, et petit à
petit on finit par enfermer toute la personne derrière des murs, fut-ce ceux de
la maison. On efface tout bonnement sa
présence des lieux publics, ou alors en la tolérant à des heures
réservées. Procès d’intention ??
Nos
grands-mères ne se sont pas battues pour rien en revendiquant et en obtenant le
droit de disposer librement de leur corps et de l’afficher fièrement. D’autres
dans le monde se battent encore. Trop facile de minimiser tout risque de
régression de notre société. Faut-il encore et toujours citer Simone de
Beauvoir : N’oubliez jamais qu’il
suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des
femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez
rester vigilantes toute votre vie.
J’avoue qu’aujourd’hui croiser dans la rue des femmes entièrement voilées me plonge dans la perplexité… Très éloigné des
mille et une nuits de Shéhérazade ou d’un orientalisme aux multiples couleurs
et parfums à l’image des saris des
femmes indiennes, plus qu’un simple foulard sur les cheveux, comme des
générations ont pu en porter sous le nom de fichu, plus qu’une simple tradition
ou un signe d’interculturalité, le voile actuel ne me semble décidément pas un
objet banal et anodin. Une longue robe noire ou grise masquant la quasi-totalité
du corps et de la tête, de fait ne passe pas inaperçue…
Certes, le corps féminin est savamment instrumentalisé par les publicitaires. Constat
récurrent mais toujours choquant d’une utilisation de la beauté à des fins purement
marketing. Certes, certaines femmes, en particulier des jeunes filles en mal
d’identité et de repères, peuvent en réaction avoir envie de se réfugier
derrière une couverture, au nom de la religion ou pas. Et il y a bien de quoi se perdre dans cette
forêt d’injonctions contradictoires qui peuple notre société… Vouloir s’émanciper des diktats est une bonne chose. A condition de ne pas être récupéré... C’est à ce titre très intéressant de voir que
de grandes enseignes s’engouffrent dans ce nouveau marché qu’est
la mode islamique. La bonne aubaine que
voilà, trop belle pour la laisser filer et au diable toute considération sur le
fond.
La liberté de
s’habiller selon son choix est un droit,
et loin de moi l’idée de le remettre en cause, ou de m’affranchir du corollaire
de la laïcité : la liberté des cultes. Mais alors que le port du pantalon a été à une
époque le moyen d’assumer l’égalité
vestimentaire entre les hommes et les
femmes, sans pour autant « gommer » leurs différences, le port du
voile uniforme est plutôt en train de fracturer les relations entre les sexes,
et entre les citoyens. C’est bien dommage
quand nous avons tant besoin d’apaisement. Comme il est finalement dommage que
le Ministère des droits des femmes soit placé après celui de la famille et
de l’enfance. Affaire de symbole
peut-être mais pour ma part je ne suis pas insensible aux symboles, et à leurs
représentations, dans la sphère publique et sociale comme dans la vie privée.
Au-delà des apparences et du voile qui peut parfois les recouvrir.
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