En sortant d’une commission
municipale au cours de laquelle nous venions d’aborder la question de la
modernisation de l’hôpital Edouard Herriot, j’ai eu comme un moment d’absence…
C’est que la dernière fois où j’y suis allée, c’était pour rendre visite à mon
collègue et ami Philippe Jeantet.
Les souvenirs affluent
alors : de Philippe sur son lit d’hôpital au garçon gentiment frondeur
rencontré pendant la campagne des municipales de 2008.
Je rentre chez moi. Déjà la
nuit en chemin – perfidie du changement d’heure qui nous plonge dans les
ténèbres avant 18h… Je réponds à
quelques mails et en archivant des documents sur mon ordinateur, je tombe sur
le discours que Thierry Philip avait lu lors des obsèques de Philippe, le 26
avril 2010.
Un hasard, je n’y crois pas.
Plutôt un signe envoyé par je ne sais quel réseau immatériel qui nous relie les
uns aux autres. L’envie d’y croire…
Alors, Philippe, je t’écris
où que tu sois. Je t’écris pour que tu continues à vivre dans la pensée de
celles et ceux qui t’aimaient bien.
Et puis, je me souviens qu’on
disait toi et moi, un peu en plaisantant, que je devrais « griffonner »
quelque chose sur les petits et grands évènements qui émaillent un mandat
d’élu. Tu disais : « 6 ans, c’est long et il va se passer plein de
trucs… ». Toute une aventure… Tu es parti bien avant la fin et moi j’ai
replongé pour un nouveau mandat. Alors c’est sûr, j’ai plein de trucs à te raconter,
pas le temps d’en faire un roman, mais retracer quelques bribes de nos vies, ça
oui…
D’abord, un heureux
événement : Ludivine a eu un bébé, une petite fille prénommée Apolline. Et
puis maintenant, à la mairie, on marie des gens du même sexe. Ah oui, et ça
t’aurait bien fait plaisir : on a réussi à décrocher le portrait de
Nicolas Sarkozy de la salle des mariages, remplacé par François Hollande, élu
en 2012.
A ce stade du quinquennat, je
suis certaine que nous aurions ensemble de longues conversations sur l’avenir
de la gauche et les orientations du gouvernement actuel. On ne serait pas
d’accord sur tout, même si je dois avouer que toute socialiste que je sois, je
suis un peu déçue par la politique du changement … Notre conversation se
finirait fatalement par un verre de L’Autre côté du pont. D’ailleurs, je n’y
vais plus guère depuis que tu es parti. C’est plus pareil… et désormais, je
passe rarement cours Gambetta.
Christiane Poly est partie
elle aussi, emportée par la même maladie que toi.
Notre maire a quitté Léon
Bérard et a été élu président de l’Institut Curie. Il y consacre toute
l’énergie dont tu le sais capable.
Lyon va devenir une
métropole, et on construit de nouvelles tours à la Part-Dieu. Le 3ème
ne cesse de grandir et a encore plein de projets à réaliser, avec les anciens
et les nouveaux élus.
Jérôme s’occupe toujours de
la Culture et Abdel du Sport, Catherine de l’Urbanisme et Rolland des Droits
des citoyens. Laurent arpente encore l’arrondissement à vélo. Fabrice est au Commerce
et Anne a succédé à Yves Fournel à l’Education et j’allais oublier : Najat
est devenue ministre… de l’Education, après un passage au ministère des Droits
des femmes. Eclatant parcours … Martine Roure n’a plus de mandat politique mais
elle est présidente de Lahso, une association qui te plairait, je crois.
Guy est adjoint au Maire de
Lyon, tout comme Anne et Képé, et Jean-Louis Touraine a été réélu député. Moi,
j’ai toujours la responsabilité du forum des associations, dont une allée porte
ton nom… Je suis aussi déléguée à la Politique de la ville et à l’Education populaire
mais plus auprès des Anciens combattants. Tu ne pourrais plus me taquiner à ce
sujet…
Claude a terminé – enfin
presque, les travaux de notre appartement et se consacre désormais à réaliser
des films. Tu te souviens sans doute de celui de la campagne, le premier. Ben
voilà, il a attrapé le virus…
Parmi les nouveaux que tu ne
connais pas, il y a Lucie. Elle a repris le dossier de l’Economie sociale et
solidaire, un sujet qui te passionnait tellement… Mais je sens que tu voudrais avoir
des nouvelles de l’Olivier des Sages… Eh bien, tu serais fier car le « bébé »
est devenu grand et fort. Il a même un p’tit frère à Villeurbanne ! Il
faut continuer bien sûr à l’accompagner… Solange et Zorah sont toujours aux
commandes et la prochaine étape, c’est la création d’une épicerie sociale et
solidaire en 2015.
Voilà, Philippe, j’ai eu 50
ans et je suis même devenue grand-mère… Tu vois, j’ai réussi à te faire
rire ;)
Et puis il y a ce blog. J’y
consigne un tas de choses pour conserver la mémoire du temps qui s’écoule et
des belles rencontres que nous offre la vie, au passage. Mes colères aussi,
parfois…
Pardon pour cet inventaire à
la Prévert mais j’ai tout écrit d’un trait, avec parfois des larmes dans les
yeux. Et je ne voulais pas « retoucher » ces lignes …
Je vais finir ma lettre en citant
quelques phrases de Thierry Philip, prononcées au moment de te dire adieu :
« … A Saint Pierre, nous avons tous envie de dire : toi Saint Pierre
qui préside au paradis, si tu crois t’en sortir avec juste un petit projet
alternatif au sien, un bistrot… mais sans olivier, c’est mal connaître le
personnage. Il ne lâchera rien, il sera prêt à renoncer au paradis, il n’est
pas dans la demi-mesure le Philippe (…) Alors, tu vois, Philippe, le terrain,
si terrain il y a là-bas, le terrain est préparé, il t’attend de pied ferme, le
Saint Pierre, prêt à poursuivre au-delà de tes espérances les plus déjantées,
les projets qui te tenaient tant à cœur. Et nous on va rester là, bouche bée,
englués dans la réalité d’ici-bas, pas certains d’arriver à construire pour le
plus grand nombre un petit bout de paradis sur terre. Et sans toi, ce sera
encore plus dur, Philippe …»
C’est tellement vrai … On n’a
pas fini de se battre ici-bas !
Lyon,
le 8 novembre 2014
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