A l’heure où France 2 vient
de diffuser un téléfilm intitulé Le chapeau de Mitterrand,
difficile d’oublier le vingtième anniversaire de la disparition de l’homme, le
8 janvier 1996.
L’année 2016 marquera également le centenaire de la naissance
de François Mitterrand, à Jarnac, pays charentais, dans une famille de
bourgeoisie de province.
Bref, il occupe toujours les esprits celui qui
disait aux français dans ses derniers vœux de président : « Je ne
vous quitterai pas… ».
Le style, l’époque ont
disparu avec lui, comme aujourd’hui le droit d’inventaire. Enfin presque… Reste
une figure tutélaire, « statue du commandeur », toujours source
d’inspiration mais difficile à égaler. Il suffit de réécouter un de ses discours
pour s’en convaincre. Puissance rhétorique, alchimie du verbe et du geste pour
imprimer à jamais les mots de la politique. Certains diront « maux »
en pensant aux promesses non tenues, aux déroutes et autres revirements. Il en
va de la politique comme de toute conduite humaine se heurtant aux contours de
la réalité. Pour Mitterrand, ce fut le fracas de la mondialisation confronté à
l’idéal socialiste. On peut bien être philosophe, faire des films, écrire des
livres, prédire l’avenir, que sais-je encore ? Gouverner ne ressemble à
rien de tel. Le pouvoir, cet illustre inconnu, si difficile à incarner et sujet
à tant de controverses…
De Mitterrand, outre la place
dans l’histoire de la cinquième république, persiste l’image d’un être
éminemment romanesque. Julien Sorel hésitant entre l’habit sacerdotal, le noir,
et l’épée, le rouge, ce pourrait être lui dans sa jeunesse. Epris de la sage
Madame de Rênal et de la fougueuse Mathilde, toujours lui. Son esprit de
conquête était célèbre… inlassable séducteur et amoureux de Venise, la ville
galante.
La Résistance lui aura donné
les clefs d’un monde en pleine recomposition. En retrouvant Robert Antelme, le
mari de Duras à la libération des camps, il éprouve la douleur et l’inhumanité :
l’holocauste. Il n’aura de cesse plus tard de travailler à l’amitié entre la
France et l’Allemagne et à la construction européenne. Son grand projet. Les Rastignac
d’aujourd’hui, et ils sont nombreux, peuvent bien s’époumoner du haut de la
montagne Sainte Geneviève, leur Paris n’est pas gagné et le public un brin désabusé…
L’ambition ne se décrète pas, pas plus que l’inspiration. Elle se rencontre à
la croisée des chemins et des hommes, comme la rime le poète, la pensée l’auteur. Choisissant son heure. Ecrivain par intermittence, Mitterrand connaissait
les caprices de la muse, calmait ses ardeurs avec les Essais de Montaigne, et savait
aussi laisser du temps au temps, fidèle au Promeneur du champ de mars,
se frayant un chemin au milieu des livres, à la recherche d’une édition rare,
d’une belle reliure. La littérature, son autre passion…
Lecteur de Machiavel, il
était amateur de stratégie. Il a souvent gagné à ce jeu-là.
Sur la fin, le combat était
devenu inégal et le doute, terrible, le hantait.
Sa quête était devenue plus spirituelle
que politique. Croire ou ne pas croire ? Tel un personnage de Dostoïevski
déchiré entre la lumière et l’abîme des ténèbres.
Il est parti et avec lui dans
la mort cette aura de mystère, ce sourire de sphinx parfaitement énigmatique.
A chacun sa part de vérité
pour se souvenir de ce François-là ...
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