Difficile d’être passé à côté cet été, à la plage, et même à
la ville où les vagues de chaleur successives ont modifié nos habitudes
vestimentaires. Il ne s’agit pas du port du minishort ou des tongs qui tiennent
déjà le haut du pavé dès que la température grimpe, mais de la nouvelle mode du
tatouage.
Bien loin de la tendance soft Daho 86 et de son « Epaule
Tattoo » chérie des ondes radiophoniques cette année-là, le tatouage ose désormais
une version in extenso. Au gré d’un bras, d’une jambe, au détour d’un
dos, arabesques et pointillés sortent au grand jour.
Nul besoin de retracer toute l’histoire de cette pratique
d’origine tribale, symbole de reconnaissance, d’appartenance dont la racine
renvoie à la langue tahitienne, tataus.
Après quelques apparitions marquantes au cinéma, Steve Mc Queen
en Papillon condamné au bagne à perpétuité, Gabin transportant un
Modigliani sur le dos, ou encore le magnifique et très inspiré Alabama
Monroe, son évolution répondrait à d’autres critères d’influences.
Suggestion d’un ami à qui j’ai parlé de mon article en préparation :
dernier avatar des films X… Ce à quoi je réponds que, de toutes manières, je
préfère ceux du Losange, de films… Bref.
Autre piste avancée, les stars du foot qui n’hésitent pas à
arborer moult tatouages, photos en couverture de magazine à l’appui. Idoles des
temples modernes, n’ayant plus rien à envier aux champions de l’ovalie ? Arrivé
à ce stade, je quitte le terrain, trop médiatique à mon goût.
Mon intérêt dans cette affaire serait plutôt de décoder le
phénomène, vu de la rue. Curiosité piquée à vif, me direz-vous…
De passage au Binic Folk Blues Festival pendant les vacances,
j’ai bien essayé de poser la question à plusieurs individus- garçons et filles
confondus- dont le signalement correspondait à ma recherche, dans un esprit parfaitement
clanique. Ni « very bad-boy », ni sortis du rayon des cultissimes décalcomanies
Malabar… Elles et ils se sont montrés évasifs, m’invitant à boire un verre et à
ne pas me prendre la tête en plein mois d’août. Désolée, mais je n’arrive pas à
bronzer idiote ais-je répondu en acceptant néanmoins une Coreff, la bière
locale. Même si j’ai un faible pour la Philomène, un autre cru de bière
bretonne. Pour les amateurs d’eau douce et de « Breizh attitude » en
bouteille, la Plancoët reste une valeur sûre…
Je m’amuse un peu comme si je n’arrivais pas à m’attaquer de
front au sujet : évoquer ceux qui écrivent sur leur corps. Sur les mûrs,
c’est plus simple et moins définitif. Cela nous parle de mai, de révolution, de
street art. Celui qui aime écrit sur les murs… disait Elsa
Triolet.
La peinture sur soi, c’est différent. Un art appliqué ?
A apprécier au regard du temps et du talent requis pour décliner ces marques de
style.
Une image me revient alors, celle d’un film, The pillow
book. L’intrigue « made in Japan » mettait en scène une jeune femme-écrivaine
usant de la peau comme d’une toile manuscrite.
Il faut dire que son initiation avait commencé très jeune,
quand son père, célèbre calligraphe, lui dessinait sur la joue un vœu
d’anniversaire.
Où et comment se termine le parcours de l’héroïne et de son
livre unique, j’avoue en avoir oublié le détail. L’écriture, via le ballet de
la plume, étant plus palpitante que la chute de l’histoire. De l’art et de la manière
de (se) raconter comme personne !
Reprenant mon propos avec ce modèle en tête, j’entrevois
peut-être l’actuelle quête de sens du tatouage : un dessein pérenne,
incarné, à l’heure du tout éphémère, de la consommation volatile, même si un
tatouage peut toujours en recouvrir un autre…
Acte militant, signe d’engagement, choix de vie tracé à
l’encre indélébile, si tous ces motifs sont bons, sa réalisation n’en est pas
moins anodine. Grain de peau sensible, la prudence est de mise…
Plus « couture », s’afficher (très) tatoué c’est revêtir
une parure éternelle ou presque, un habillage chamarré à fleur de peau pour
tous les jours, même gris, ordinaires.
Comme dirait Mademoiselle Agnès : Nous voilà habillé(e)s
pour l’hiver !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire