Chaque déménagement est une forme de détachement avec un
avant, même si on emporte avec soi des cartons remplis d’objets connectés à nos
souvenirs. Surtout si on quitte une région aimée. Ma mémoire est pleine de ces
madeleines au parfum d’enfance. Il m’arrive de les partager en écrivant.
Confidence pour confidence, ce soir c’est avec amertume que je songe à tous ces
paysages connus et les pas perdus résonnent tristement à mes oreilles. Car
depuis dimanche dernier, les sirènes lepénistes ont su séduire les électeurs de
la région lorraine, renommée « Grand Est » depuis son mariage avec
l’Alsace et la Champagne-Ardenne. Arrivé en tête à Metz, Lunéville, Toul, Longwy,
même si Nancy a résisté et placé le
candidat socialiste bon devant au soir du premier tour- merci Stanislas-, le FN
pourrait emporter la mise le 13 décembre. Je songe à cette chanson « Vous
n’aurez pas l’Alsace et la Lorraine », écrite au lendemain de la guerre de
1870. Contexte différent me direz-vous puisque cette fois-ci Lorrains et Alsaciens
peuvent librement choisir leur camp. Idem pour les habitants du Nord-Pas-de-Calais
et de PACA.
Je pense à mes amis là-bas, à ma famille, aux vivants et aux
morts qui n’auraient pu imaginer un tel avenir, un tel sort… A ces français, un
sur deux, qui n’ont pas même fait le geste d’aller voter. Désabusés,
désenchantés, toujours le même refrain… dont il faudrait bien changer…
Je pense aussi à ceux qui sont venus dans mon bureau de vote
dimanche dernier, mes voisins entre autres. A ceux qui reviendront. Aux anciens
et aux nouveaux lyonnais. Moi-même suis devenue lyonnaise il y a dix ans. Par
choix. Nouvelle ville, nouvelle vie, à la croisée des chemins. Emménagement
dans un arrondissement au hasard, enfin presque, entre Part-Dieu et Berges du
Rhône, au cœur de la cité. J’aurais certes pu m’installer ailleurs, à Paris ou
à Rennes, ou encore Marseille, et l’histoire aurait été différente. Plus ou
moins belle. Et pourquoi ( pas) le
Brésil ? ajouterait Christine Angot. That is the question… Mais voilà
c’est à Lyon que je vis, milite, travaille. Et j’aime ma nouvelle région, à la
fois ouverte sur le monde et fidèle à ses valeurs. Pas de danger immédiat d’une
victoire du Front national en Rhônes-Alpes-Auvergne. Pour autant, ne pas
baisser la garde. Rester vigilants face à une droite extrême et arrogante… Donner
envie aux abstentionnistes d’exercer leur droit de citoyens. Responsables.
La journée de dimanche prochain promet d’être longue. Dans
les bureaux de vote et ailleurs.
Et sous tension en cette période d’Etat d’urgence. Entre
« front républicain » et stratégie du « ni-ni », chère
à Nicolas Sarkozy.
Le soir venu, j’espère ne pas finir trop NRV, à l’image de
mes initiales.
Comme quand on me fait épeler mon nom, et répéter que Vannini
prend bien deux « N ». Lyonnaise
ou Nancéienne, même combat ! D’ailleurs l’orthographe et la prononciation,
c’est une autre des épreuves des jours d’élection. Les yeux rivés sur le cahier
d’émargement et les cartes d’identité, rester attentif à ne pas faire de faute
pour ne pas froisser la personne en face de soi, respecter ses origines, son
histoire. Je me souviens d’une dame qui tenait absolument à l’accent sur son
« e » final. Veiller à ne pas troubler l’électeur, suffisamment désorienté
au moment de faire son choix : l’isoloir, les papiers à présenter, le
vote, la signature. Il lui faut tout faire dans le bon ordre, sous les regards ...
L’enjeu est le même pour le président ou la présidente de
bureau avant de clore le scrutin, de passer au décompte des voix et à la fin
des opérations électorales.
La politique n’est pas seulement affaire de calcul. C’est aussi
le lieu des humanités…
Un belle article ma chère Nathalie..la montée du FN nous fait peur!!! ainsi que la faible mobilisation pour le vote!.. souhaitons que les Français se ressaisirons..
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